Le paysage, le sol, le fromage et moi Read in English
Voici le paysage des Ardennes parcouru pendant 1 mois,
pour y recueillir le lait de 4 fermes situées dans 2 pays
Le biotope des sols de pâturages d’une de ces fermes
a été analysé et exploré au microscope
Differentes sortes de fromages ont été fabriquées dans les cuisines
de la Jan Van Eyck Academie, à l’aide de ferments « sauvages » et domestiques
Les fromages furent partagés avec les artistes résidents
pendant les semaines d’affinage suivant le mois d’avril
Un mur ancien couvert de dessins représentant les habitants du sol
constituait l’élément principal de l’exposition des Open Studios de 2021
Le long du mur pendait Soil and sacrement d’Aliki van der Kruijs, 2 rideaux faisant
écho à l’exposition et aux sons enregistrés dans le paysage
La contre-forme des fromages produits, le lactoserum issus des 250L de lait transformé,
était exposé à côté des rideaux, de la fresque et des fromages
Confinés dans la Jan van Eyck Academie pendant l’essentiel de leur résidence, The Soft Protest Digest a adopté une attitude d’introspection autour de questions de transition vers une forme d’autonomie alimentaire dans les situations précaires, qu’elles soient liées à une pandémie ou à une crise écologique. Sous la forme d’une performance d’un mois, Robin a fabriqué et affiné des fromages issus de laits crus produits localement. Il a enregistré sa voix lors de ses longs voyages à vélo pour acheter le lait aux éleveuses.eurs; dont il collecta aussi les sols pour étudier leur biotope. Cette routine performative mis Robin au diapason des rythmes de mutualisme, croissance, et décomposition du paysage.
♦ PAYSAGE ♦
Le paysage se déployait sur une zone d’environ 50km2 de diamètre autour de Maastricht. Le réseau de 4 fermes amena Robin à rencontrer 4 exploitants.es belges et néerlandais.es. Les prairies du paysage pourvoient aux animaux domestiques (vaches et chèvres) les plantes qu’elles broutent et ruminent, digèrent et transforment en lait. Sur le chemin de chaque ferme, Robin enregistrait sa voix. Il essayait de décrire à l’avenant ce qui composait le paysage: l’addition d’êtres vivants grandissant, chassant, partageant et travaillant dans l’espace englobant le réseau de routes de son logement aux 4 différentes fermes.
♦ SOL ♦
Robin a extrait un échantillon de sol d’une des prairies de la ferme Hoeve de Koeberg (l’exploitation biologique de René et Claudia) fin avril 2021. Ce sol ramené chez lui fut exploré au microscope pour voir quels êtres vivants y vivent; mais aussi réfléchir au rôle des décomposeurs dans la dégradation et le recyclage de la matière organique, les changements environnementaux qui menacent ce mutualisme, et leur analogie avec les sociétés microbiennes qui créées les fromages.
Pour les Open Studios de la résidence, une fresque a été dessinée avec le bois brûlé trouvé dans le jardin, sur un vieux mur de la Jan van Eyck Academie. La fresque représente 3 échelles de décomposeurs du sol: macrofauna, mesofauna et microfauna.
♦ FROMAGE ♦
Des fromages étaient fabriqués 5 jours par semaine, avec du lait cru de chèvre et/ou de vache des 4 différentes fermes. Caillés avec de la présure animale, les fromages n’étaient pas cuits, souvent non-pressés, parfois pressés pour les plus gros. La moitié d’entre eux ont été inoculés avec des ferments (G. candidum, P. camemberti, P. roqueforti) et l’autre moitié développa les microbiotes «sauvages» du lait utilisé. Ils ont été affinés de une semaine à 6 semaines dans une pièce froide et humide, sans apport d’énergie pour en contrôler les conditions.
♦ MOI ♦
«Fromage, qui es-tu?
Je suis une colonie de micro-organismes, mon territoire est le substrat dont je me nourris.
Je suis une collaboration invisible et pourtant planifiée, entre animaux domestiques et microbes.
Je suis un processus complexe qui préserve un liquide nutritif
fragile, produit par les mammifères pour leur progéniture.
Je suis l’agrégation des graisses et protéines qui se séparent du lactosérum, le petit-lait.
Je m’habille d’une croûte vivante pour conserver les nutriments du lait sans déperdition d’énergie.
On me met à la cave ou dans le cellier et on me mange des jours, des semaines, des mois, des années plus tard.»
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